À l’issue du 97e CFP, les villes de Moncton et Dieppe au Canada ont été désignées pour organiser la 9e édition des Jeux de la Francophonie. Mais début 2019, le Premier ministre du Nouveau-Brunswick Blaine Higgs a annoncé que sa province renoncerait à organiser les Jeux.
Cette décision, au-delà de renvoyer une mauvaise image du Canada à l’étranger, a aussi ravivé les tensions entre anglophones et francophones dans un pays bien moins calme qu’il n’y paraît. Que s’est-il passé ? Pourquoi le Nouveau-Brunswick s’est-il retiré de l’organisation ? Quelles solutions ont été prises pour pallier à ce désengagement ?
Le Nouveau-Brunswick renonce aux Jeux
Le 30 janvier 2019, le gouvernement du Nouveau-Brunswick annonçait dans un communiqué de presse : « les Jeux de la Francophonie 2012 n’iront pas de l’avant au Nouveau-Brunswick en raison de l’augmentation des coûts et du manque d’engagement en matière de financement ».
Le Premier ministre de la région, entré en fonction deux mois plus tôt, a justifié sa décision de la manière suivante : « Lorsque nous sommes arrivés au pouvoir, nous avons été informés que les coûts de ses jeux étaient sept fois plus élevés qu’au départ ».
Les prévisions budgétaires des villes de Dieppe et Moncton, initialement de 17 millions de dollars canadiens, ont bondi à 130 millions d’après les chiffres officiels, ce qui explique le désengagement de la province du Nouveau-Brunswick. Si cela semble tout à fait sensé, la réalité est plus nuancée.
Jeux 2019 : la bataille de chiffres
Le chiffre de 130 millions avancés par les deux villes organisatrices (et repris par Haines) était très largement exagéré. Dans les jours qui ont suivi, le comité organisateur l’a revu à la baisse, en l’établissant à 62 millions. Il s’est finalement établi aux alentours de 80 millions à la fin de l’hiver 2019.
Les adversaires de Blaine Higgs ont accusé le Premier ministre d’avoir instrumentalisé les premières prévisions pour justifier un retrait qui était prévu depuis longtemps.
À la suite du retrait de Moncton et Dieppe, la ville de Sherbrooke a annoncé qu’elle débloquait une enveloppe de 5,5 millions afin de sauver les Jeux. Le Québec et le Canada n’avaient donc plus qu’à mettre environ 35 millions chacun.
La province francophone a refusé d’aller plus haut que 17 millions, un chiffre bien trop bas pour couvrir les dépenses en sachant que le gouvernement fédéral ne peut pas engager une somme plus importante que celle des régions.
Il y a bien eu des négociations ultérieures, mais aucune solution n’a été trouvée. La 9e édition des jeux de la Francophonie ne se déroulera donc pas au Canada. Une bien triste nouvelle pour les amoureux de la langue de Molière.
Décision politique selon les francophiles
La décision de Blane Higgs était actée depuis longtemps, comme l’a supputé le ministre des Affaires intergouvernementales du Canada Dominic LeBlanc : « Je ne suis pas surpris, je crois qu’ils avaient planifié de faire échouer les jeux (…) M. Higgs n’a jamais eu l’intention d’en venir à une proposition sérieuse ».
Plusieurs ministres fédéraux ont accusé Higgs d’être de mauvaise foi et d’avoir tout fait pour ne pas trouver de solution. Justin Trudeau, le Premier ministre canadien, a laissé entendre son désarroi : « C’est une journée triste pour les gens du Nouveau-Brunswick, la communauté francophone de la région et les francophones du monde entier ».
Selon Mélanie Joly, cette décision est à mettre sur le même plan que les coupes budgétaires prises par le Premier ministre de l’Ontario Doug Ford qui ont totalement asséché l’Université de l’Ontario français et le Commissariat aux services français de l’Ontario.
Mélanie Joly met aussi en avant le fait que la décision d’annuler les Jeux a été prise par un gouvernement minoritaire qui est obligé de s’appuyer sur l’Alliance des Gens, un parti très hostile au bilinguisme dirigé par Kris Austin, pour exercer son pouvoir. Rappelons que Blane Higgs a été membre dans les années 1980 du parti anti-bilinguisme « Confederation of Regions . Les deux font la paire comme dit le proverbe.
La décision de Higgs était-elle uniquement motivée par les chiffres ou bien était-elle idéologique ? Un peu des deux sûrement. Le Premier ministre du Nouveau-Brunswick a sans doute utilisé des prévisions exagérées pour prendre une décision qui a une résonance politique très forte.
Quoi qu’il en soit, cela met en lumière la difficile situation de la langue française, dans un pays qui passe souvent pour un exemple en matière de cohabitation entre les cultures.
La RDC organisera les Jeux 2019
Alors qu’aucune solution n’a été trouvée pour que les Jeux de la Francophonie puissent se tenir au Canada, le CPF n’a pas eu d’autre choix que de contrevenu au fameux principe d’alternance. Les Jeux 2017 ayant été attribués à Abidjan, ils auraient dû se dérouler dans une ville du « Nord ».
C’est finalement la République démocratique du Congo qui a été choisie par le Conseil Permanent de la Francophonie pour organiser la 9e édition des Jeux. Le pays s’est engagé à débuter les travaux de construction du village olympique avant le CPF du 29 octobre 2019.
Cette manifestation est une chance, mais aussi un risque pour l’un des pays les plus instables de la région subsaharienne. Espérons qu’il donne une meilleure image de la francophonie que les Canadiens.